Les rayons sont-ils dangereux ?

il n’y a actuellement pas de remplacement complet des techniques irradiantes par d’autres techniques. Le fait de ne plus utiliser les rayons X conduirait à des diagnostics non faits, et donc à un risque pour la santé des patients et de la population.

Il convient par contre :
–  de remplacer autant que possibles les rayons X par d’autres techniques (magnétisme : IRM ou ultrasons : échographie).
– de limiter l’irradiation quand on utilise les rayons X.

LES RISQUES ?

Les risques immédiats à type de brulure cutanée sont quasi inexistants lors des examens de radiologie diagnostique
Les risques à distances (cancers radio-induits par exemple) sont plus liés à l’accumulation des doses sur plusieurs examens successifs.

QUE FAIRE ?

Les risques immédiats sont contrôlables par le bon réglage des appareils et  la formation du personnel encadrés les normes de contrôle. Le respect des règles doit permettre d’éliminer ces risques.
Les risques à distances sont liés à de mauvaises prescriptions, à l’accumulation d’examens plus ou moins utiles, à des choix techniques imposant des irradiations non utiles. La connaissance des risques et le choix permanent de la bonne technique avec un contrôle constant des doses délivrés  limite l’accumulation au cours de la vie d’une même personne et donc le risque de développer un cancer.

État des connaissances sur les dangers et les risques liés aux rayonnements ionisants.

Quels enseignements pour une utilisation des rayonnements ionisants lors d’expositions à des fins médicales ?

Les rayonnements ionisants sont définis comme étant capables de produire directement ou indirectement des ions lors de leur passage à travers la matière. Parmi eux, on distingue les rayons X, les rayonnements gamma, alpha et bêta ainsi que les rayonnements neutroniques et protoniques, tous caractérisés par des énergies et des pouvoirs de pénétration différents.

Deux types d’effets biologiques : les effets déterministes et les effets stochastiques

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    Les effets dits déterministes ou tissulaires

    Qu’ils soient le fait de particules chargées, par exemple un électron (rayonnement bêta) ou un noyau d’hélium (rayonnement alpha), ou de photons du rayonnement électromagnétique (rayons X ou rayons gamma), les rayonnements ionisants interagissent avec les atomes et les molécules constitutifs des cellules de la matière vivante et les transforment chimiquement. Parmi les lésions ainsi créées, les plus importantes concernent l’ADN des cellules ; elles ne sont pas fondamentalement différentes de celles provoquées par certaines substances chimiques toxiques, exogènes ou endogènes (résultant du métabolisme cellulaire).

    Lorsqu’elles ne sont pas réparées par les cellules elles-mêmes, ces lésions peuvent conduire à la mort cellulaire et à l’apparition d’effets sanitaires dès lors que le tissu ne peut plus assurer ses fonctions. Ces effets, appelés « effets déterministes », sont connus de longue date puisque les premiers effets ont été observés dès la découverte des rayons X par Röntgen (1895). Ils dépendent du type de tissu exposé et apparaissent de façon certaine dès que la quantité de rayonnements absorbée

    dépasse un certain niveau de dose. Parmi ces effets, citons par exemple l’érythème, la radiodermite, la radionécrose et la cataracte. Les effets sont d’autant plus importants que la dose de rayonnements reçue par le tissu est elle-même importante.

    Le risque déterministe peut être limité en maintenant les expositions aux radiations à des niveaux inférieurs au seuil d’apparition (ex. : 2 Gy pour la peau).

    Les effets déterministes sont les plus spectaculaires, avec des lésions cutanées sévères rapportées chez quelques patients, mais ils n’épargnent pas les équipes médicales : plusieurs études montrent une incidence de la cataracte majorée d’un facteur 2 à 3 chez les radiologues et les cardiologues interventionnels.

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    Les effets stochastiques, probabilistes ou aléatoires

    Après interaction des rayonnements ionisants avec les atomes et les molécules constitutifs des cellules de la matière vivante, lorsque que ces dernières ne meurent pas, elles peuvent aussi réparer, mais de façon imparfaite ou erronée, les lésions ainsi provoquées. Parmi les lésions qui subsistent, celles de l’ADN revêtent un caractère particulier car les anomalies résiduelles d’ordre génétique peuvent être transmises par divisions cellulaires successives à de nouvelles cellules. Une mutation génétique est encore loin d’une transformation en cellule cancéreuse mais la lésion due aux rayonnements ionisants peut constituer une première étape vers la cancérisation.

    L’apparition des effets cancérogènes n’est pas conditionnée au dépassement d’un seuil de dose, seule une probabilité d’apparition peut être énoncée pour un individu donné. On parle alors d’effets probabilistes, stochastiques ou aléatoires. La suspicion d’un lien de causalité entre une exposition aux rayonnements ionisants et la survenue d’un cancer remonte au début du XXe siècle (observation d’un cancer de la peau sur une radiodermite). Depuis, plusieurs types de cancer ont été observés en milieu professionnel, dont certains types de leucémie, des cancers broncho-pulmonaires (par inhalation de radon) et des sarcomes osseux.

    Hors du domaine professionnel, le suivi d’une cohorte d’environ 85 000 personnes irradiées à Hiroshima et Nagasaki a permis de faire le point sur la morbidité et la mortalité par cancer après exposition aux rayonnements ionisants. D’autres travaux épidémiologiques, par exemple, ont permis de mettre en évidence, chez les patients traités par radiothérapie, une augmentation statistiquement significative des cancers (effets secondaires) imputables aux rayonnements ionisants.

    Les études épidémiologiques n’ont pu mettre en évidence des pathologies liées aux rayonnements ionisants que pour des doses de rayonnements relativement élevées, avec des débits de dose élevés (exemple : suivi des populations exposées lors des bombardements d’Hiroshima et de Nagasaki). Dans une optique de gestion du risque, il est fait appel à la technique de l’évaluation des risques qui, au moyen de calculs, permet, en extrapolant les risques observés aux plus fortes doses, d’estimer les risques encourus lors d’une exposition aux faibles doses de rayonnements

    ionisants inférieures à 100 millisievert (mSv). Pour ces estimations, l’hypothèse prudente d’une relation linéaire sans seuil entre l’exposition et le nombre de décès par cancer a été adoptée à l’échelle internationale. Avec cette hypothèse, il est considéré qu’il n’existe pas de seuil de dose en dessous duquel on pourrait affirmer qu’il n’y a pas d’effet. La légitimité de ces estimations et de cette hypothèse reste cependant controversée au plan scientifique. Sur la base des travaux scientifiques de l’UNSCEAR, la Commission internationale de protection radiologique (voir publication CIPR 103, chapitre 3 point 1.1.1) a publié les coefficients de risque de décès par cancer dû aux rayonnements ionisants, soit 4,1 % d’excès de risque par sievert (Sv)

    pour les travailleurs et 5,5 % par sievert pour la population générale.

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    La relation linéaire sans seuil

    L’hypothèse de cette relation, retenue pour modéliser l’effet des faibles doses sur la santé, aussi pratique soit-elle sur un plan réglementaire, aussi

    prudente soit-elle sur un plan sanitaire, n’a pas toute l’assise voulue sur un plan scientifique :

    certains estiment que les effets des faibles doses pourraient être supérieurs, d’autres pensent que ces doses pourraient n’avoir aucun effet en deçà d’un certain seuil. La recherche en biologie moléculaire et cellulaire permet de progresser, les études épidémiologiques menées sur des cohortes importantes aussi. Mais, face à la complexité des phénomènes de réparation et de mutation de l’ADN, face aux limites des méthodes utilisées par l’épidémiologie, des incertitudes demeurent et la précaution s’impose pour les pouvoirs publics. Les effets stochastiques sont, par définition, décalés dans le temps par rapport à l’exposition. Leur

    survenue est difficilement identifiable faute de puissance statistique. Néanmoins, l’importance de l’exposition de la population à l’irradiation médicale conduit à considérer ce risque comme un enjeu de santé publique pour les responsables de la radioprotection.

    Morbidité : nombre de personnes souffrant d’une maladie donnée pendant un temps donné, en général une année, dans une population

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    La radiosensibilité

    Les effets des rayonnements ionisants sur la santé des personnes varient d’un individu à l’autre.

    On sait par exemple, depuis que cela a été énoncé pour la première fois par Bergonié et Tribondeau en 1906, que la même dose n’a pas le même effet selon qu’elle est reçue par un enfant en période de croissance ou par un adulte.

    Une hypersensibilité individuelle aux fortes doses de rayonnements ionisants a été bien documentée par les radiothérapeutes et les radiobiologistes. C’est le cas pour des anomalies génétiques de la réparation de l’ADN et de la signalisation cellulaire qui font que certains patients pourront présenter une hypersensibilité extrême pouvant conduire à des « brûlures radiologiques ».

    Aux faibles doses, il existe à la fois une radiosensibilité cellulaire et une radiosensibilité individuelle qui pourrait concerner environ 5 à 10 % de la population. Les méthodes récentes d’immunofluorescence de cibles moléculaires de la signalisation et de la réparation des lésions de l’ADN permettent de documenter les effets des rayonnements ionisants aux faibles doses, en abaissant d’un facteur 100 les seuils de détection. Les effets d’une simple radiographie deviennent

    visibles et mesurables. Les recherches effectuées avec ces nouvelles méthodes d’investigation apportent des résultats qui doivent encore être confirmés avant d’être pris en compte.

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    Quels enseignements pour une utilisation des rayonnements ionisants lors d’expositions aux rayonnements ionisants à des fins médicales ?

    La radiologie regroupe toutes les utilisations fondées sur le principe de l’atténuation différentielle des rayons X dans les organes et tissus du corps humain : radiologie conventionnelle, angiographie numérisée, mammographie, scanographie, radiodiagnostic dentaire, radiologie interventionnelle. Dans ce domaine, pour un même examen, il existe une grande disparité des doses reçues selon la pratique, la qualité des appareils et la morphologie des patients. La scanographie par exemple irradie potentiellement plus que la radiographie conventionnelle. La radiologie interventionnelle, en raison du type d’acte réalisé à visée diagnostique ou thérapeutique nécessitant des durées de radioscopie prolongées, peut délivrer dans certaines circonstances des doses importantes susceptibles d’entraîner des effets déterministes des rayonnements ionisants.

    Les examens radiologiques réalisés à des fins de dépistage méritent une attention particulière.

    La médecine nucléaire regroupe toutes les utilisations de radionucléides en sources non scellées à des fins de diagnostic ou de thérapie. La médecine nucléaire diagnostique, en fréquence d’examens, est beaucoup moins utilisée que la radiologie. L’injection dans l’organisme de MRP et/ou traceurs radioactifs à des fins diagnostiques délivre des doses comparables à celles de la radiologie. Ces activités imposent des précautions particulières vis-à-vis des enfants de moins de 15 ans et des femmes enceintes. En thérapie, les activités injectées conduisent localement à des doses très élevées de l’ordre de plusieurs dizaines de grays délivrées de façon continue et imposant des règles concernant la radioprotection du personnel soignant mais également du public, de l’entourage du patient en particulier. Des consignes adaptées doivent être communiquées par le médecin réalisateur au patient afin de limiter ces expositions.

    La radiothérapie et la radiochirurgie utilisent des rayonnements ionisants qui sont soit produits par un générateur électrique, soit émis par des radionucléides en sources scellées. La radiothérapie regroupe la radiothérapie externe et la curiethérapie.

    Le gray mesure la quantité d’énergie absorbée par la matière, ou dose absorbée (1 Gy = 1 joule par kilogramme de matière irradiée)

    Les doses délivrées, qui sont élevées, de l’ordre de plusieurs dizaines de grays, font l’objet d’une planification dosimétrique précise et personnalisée avant leur délivrance. Dans ce cas, le traitement peut être répété quotidiennement et durer plusieurs semaines.

    À titre d’information, voir le tableau ci-dessous présentant les ordres de grandeur de doses dans le domaine de l’imagerie médicale.

    Les recommandations internationales ainsi que les données récentes dans le domaine de la radiobiologie justifient l’application du principe de précaution et renforcent la nécessité d’évaluer la mise en œuvre des principes de justification et d’optimisation lors d’expositions aux rayonnements ionisants à des fins médicales en portant une attention particulière aux populations ou patients les plus à risque tels que les enfants.

    Afin de permettre l’application des principes de justification et d’optimisation de la radioprotection, il est nécessaire de disposer d’outils de comparaison des niveaux de risque attribuables à des sources d’exposition différentes (ex. : une scintigraphie et un scanner). Les paramètres d’exposition de chaque type d’examen doivent être rendus intelligibles et exprimés à travers l’utilisation d’un concept unique ; c’est le sens de la dose efficace (mSv) qui intègre le risque de cancer attribuable à chaque organe exposé par une pondération tenant compte de la radiosensibilité des différents tissus et de l’efficacité biologique relative de chaque type de rayonnement. La dose efficace permet de comparer, simplement, les niveaux de risque de deux examens différents tout en n’étant pas applicable à l’échelle individuelle d’un patient.

    Texte tiré de l’annexe 1 du document de l’HAS intitulé « Radioprotection du patient et analyse des pratiques dpc et certification des établissements de santé »